Le temps n’est pas au beau en ce moment !
C’est vrai, on peut dire que le temps n’est pas beau en cet automne : Il pleut, il fait gris et froid, il neige…Mais c’est normal car c’est l’hiver qui arrive ! Mais dans nos vies au quotidien, quel temps fait-il ? La grisaille est-elle aussi est de mise ?
Quel temps pour ceux à qui nous même demandons de toujours patienter, en disant maladroitement, lorsqu’on ne sait plus quoi faire :
-Ne t’inquiète pas, ça va aller mieux ! Avec le temps, ça va s’arranger !
De ces paroles sans conséquence pour nous, qu’entendent-ils ceux, qui déboutés du droit d’asile, vivent dans la clandestinité, espérant toujours une régularisation, qui ne vient pas. De maintes fois, ils leurs a été dit de ne pas désespérer, car maintenant qu’ils sont en France depuis plus de 5 ans, une circulaire va pouvoir s’appliquer et ils seront, à n’en pas douter régularisés, surtout vu a quel point, ils sont bien intégrés.
Mais les lois bougent, les circulaires deviennent obsolètes. On leurs dit alors 7 ans, plutôt que 5 ans. Puis plus tard :
Comme vos enfants sont nés en France, attendez qu’ils aient été scolarisé·es au moins 3 ans …
Et le temps passe, d’attentes en attentes, de lendemain d’espoir, en lendemain d’angoisse :
De l’angoisse permanente pour ceux qui attendent maintenant depuis 10 ans, d’être régularisés. Des enfants ont grandi dans ce contexte sans lendemain et posent des questions :
- Pourquoi tu travailles un peu partout papa et des fois pas du tout, c’est quoi au juste ton métier, je ne sais pas quoi répondre, quand on me le demande ?
- Et toi, maman quand est ce que tu vas passer ton permis de conduire ?
« Pas pour maintenant » dit la maman qui en rêve depuis des années, mais sans papier, sans argent, pas de permis.
Le temps passe et les galères n’en finissent pas :
Il y a de plus en plus de papiers à remplir ou pire de démarches dématérialisées, qui laissent des demandeurs dans l’attente, sans interlocuteur pour expliquer comment faire. Combien sont-ils ceux qui abandonnent dans le doute et renoncent ainsi à leurs droits, devant l’insurmontable tâche. C’est encore plus difficile, quand on ne maitrise la langue française ou que notre interlocuteur s’agace et nous parle comme si nous devions savoir comment faire et connaitre par cœur tous nos codes d’accès et les démarches à faire.
C’est le cas pour cette famille qui veut renouveler son droit à l’Aide Médicale d’Etat pour d’accéder aux soins, sans papier c’est le seul droit auquel elle pouvait accéder. Leur demande de renouvellement a été mis en attente depuis plus d’un an car il parait que ce n’est pas du ressort de la caisse primaire d’assurance maladie locale, c’est au national que ça se décide maintenant. Et entre temps, la loi passe à nouveau par là, avec peut-être la suppression de l’AME. Pourtant si on leurs dit encore :
- Ne vous inquiétez pas, ça ne va pas tarder, je m’occupe de votre dossier.
- Justement ! Je m’inquiète, car voyez-vous la petite intervention chirurgicale que je dois faire depuis un an est sans cesse différée et aussi parce qu’au moindre petit rhum d’un de mes enfants, je ne sais pas comment le soigner car je dois payer le médecin et tous les médicaments.
Avec le temps aussi, la confiance s’use, le regard des autres change et parfois leurs questions ravivent de douloureux parcours et fond venir les larmes :
- Vous êtes toujours au même point, qu’est ce vous avez fait pour vous en sortir toutes ces années ?
- Pourquoi vous avez quitté votre pays ? Et pourquoi la France ? Pour profiter du système !
Mais profiter de quoi ? Lorsqu’on n’a rien et droit à rien !
Seuls les œuvres caritatives, les associations ou les quelques amis rencontrés, permettent de tenir. Qui ose même profiter des petits moments de bonheur de la vie, quand on ne se sent pas légitimes d’oser les savourer et que chaque jour pèse lourd.
D’autres disent aussi :
- Ça valait bien la peine de risquer nos vies en traversant la mer sur un bateau gonflable au risque d’être englouti par les eaux, pour essayer tant mal, que bien aujourd’hui encore, de la tenir hors de l’eau ? Parfois, je n’ai plus la force de surnager, j’ai envie de me laisser couler !
- Il faut laisser du temps au temps ! Mais le temps passe et je n’ai plus la patience, je vis dans l’urgence à chaque instant, ça m’épuise et j’en suis tombée malade.
- La France ! Le pays des droits de l’homme ! Liberté égalité et fraternité ! Qu’en est-il réellement lorsqu’on me dit que si nous voulons nous en sortir, il faut trouver des relations, rencontrer telle ou telle personnalité… C’est donc devenu cela la France ? Un pays où tu obtiens des droits que si tu as les bonnes relations ? Ça me déçoit beaucoup, j’avais certainement trop idéalisé, la démocratie française. Car quoi que tu en penses, elle n’est pas si loin de la corruption que j’ai fuie dans mon pays natal.
- J’y croyais moi en la liberté, l’égalité et la Fraternité, mais lorsqu’on est un invisible, on est libre de rien, on est l’égal de personne, sauf peut-être des autres invisibles comme nous.
Seule la fraternité demeure, même si elle aussi est fragile, car chaque frère et sœur rencontré traine aussi les difficultés de sa vie, tant qu’il ne voit plus celles des autres.
C’est vrai que le fardeau est lourd pour beaucoup. Parfois les mots, les réflexions dépassent la pensée et blessent encore plus profondément ceux, qui sont déjà éprouvés ou discriminés :
À l’image de celui qui reste en boucle sur l’insécurité de son quartier :
- C’est la faute à tous ceux issus de telle origine ou de telle religion comme le sont les fauteurs de trouble.
Oubliant au passage que celui à qui il s’adresse, comme s’il était un envahisseur, est investit depuis des décennies dans des associations luttant pour l’égalité, l’accueil inconditionnel et qu’il est aussi un pilier de notre association qu’il a contribué à créer.
Un autre accuse son voisin :
- C’est un profiteur, un fainéant, il ne fait rien de sa vie !
Mais comment peut-il le traiter ainsi, oubliant son handicap invisible qui le condamne à vivre à un autre rythme que nous.
Un autre encore crache sans remord, dans la main qui lui a pourtant été tendue si souvent quand lui-même allait mal et déclare :
- Chacun sa m….. ! J’ai besoin de prendre du recul, alors je coupe les ponts avec vous tous et ce n’est pas la peine de me recontacter.
A-t’il juste pensé à demander à celui qui lui a tant donné, sans rien attendre en retour, comment il se sent maintenant ?
« Avec le temps va tout s’en va », chantait Léo Férré :
Alors espérons qu’avec le temps, l’hiver s’en ira et que reviendra un nouveau temps, le premier, le printemps, ce temps où tout peut enfin renaitre et fleurir à nouveau.
En attendant, il faut passer l’hiver, s’équiper chaudement pour le traverser et ne pas en laisser encore, quelques uns de plus, sur le côté de la route.
Alors ! Restons fraternels, donnons un peu la chaleur, de lumière et d’espérance à ceux qui en ont le plus besoin chaque jour. Pour cela efforçons-nous à mesurer nos paroles, sans poser de jugement, car que connaissons nous vraiment des parcours de ceux que nous accueillons dans nos fraternité et de ce qu’ils ont encore à surmonter.
Véronique MEGNIN bénévole Frat’Aire-Grand-Charmont-Pays de Montbéliard.
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